Archives de catégorie : Chroniques

99. Bill Withers, Live at the Carnegie Hall, 1973 | BV

 



 

C’est le premier disque que j’ai entendu de lui. Il me plaît beaucoup que cela se passe au Carnegie Hall, cette musique à la fois classe et simple, pleine d’émotion et efficace. J’adore Bill Withers ; on peut être un peu ramolli par son aspect un peu trop romantique, et ses longues introductions, mais il aligne les chansons (c’est un véritable chansonnier) avec une grâce et un groove incomparable et impeccable.

 

 

864. Cornelius, Point 2002 | BV



Tout un pan de cette musique oscillant entre pop, rock et électro m’a échappé, je l’avoue, dans les années 2000, mais j’avais d’autres chats à fouetter. Cornelius est sympathique et il est habile. Artisan sonore, il est un producteur impeccable. Les moments les plus foufous sont les plus intéressants certainement, Fly, Point of view Point et Another view Point. Ensuite il y a des faiblesses, dues à cette espèce d’excès d’aménité qui peut parfois peser sur l’écoute (la reprise de Brazil en est emblématique).

 

 

56. Dr John, In the right place, 1970 | BV

 



 

Premier album acheté d’occase à G, pas du tout déçu, il serait parfait si l’autre, Gris-Gris, n’était pas plus parfait. Découvert Dr John dans le fameux documentaire de Philippe Manœuvre sur le blues et le Crossroad. Le Médecin de l’Âme tire la couverture à lui, à un certain moment, et délivre une magistrale leçon de blues (docu introuvable par ailleurs parfait pour débuter, un disque avait même été produit, avec Keith Richards — par ailleurs exquis dans la vidéo — interprétant Key to the highway). Ici au sommet de son art entraîneur, l’album, porté par Such a night et Right place, right time contient également d’incomparables (et inquiétantes) pièces comme Same old same old, Qualified, où l’envoûtant (et parfait) I been hoodood.

 

 

1038. Elastica, Elastica, 1995 | BV



 

Un souvenir des années 90, un morceau imbattable (2:1). Et de bonnes chansons (Vaseline) mais qu’après coup on peine à ne pas avoir déjà entendues quelque part. Un des nombreux albums propres, bien interprétés, justement balancés entre punk et ‘concerné’, des années 90, mais qui marque le pas à acquérir son indépendance.

 

 

367. The Clash, London calling, 1976 | BV

 


 

Je connaissais la pochette par les livres. Je l’ai vue pour la première fois en vrai et en vinyle dans le car scolaire de mon bled pour Montélimar, sous le bras de A, qui venait d’un bled encore plus reculé et montagnard. J’avais follement aimé A à l’école maternelle puis surtout primaire, dès l’instant où elle a débarqué dans le village, je me rappelle bien. Ce jour de lycée, elle ramenait le disque à la médiathèque. On ne se parlait pas beaucoup. On ne s’est jamais beaucoup parlé. On s’est parlé autour du disque. Voilà : comment ne pas associer ce disque à A ?

Il y a quelque chose qui m’attirait très fort, et quelque chose de mystérieux qui m’inquiète encore. Il y a des morceaux parfaits : Brixton (l’une des meilleures chansons de l’Histoire), London, mais force est de constater qu’on n’est pas dans le punk hardcore… il y a des morceaux super mais aussi des morceaux moins intéressants, il faut le dire. C’est la variété qui frappe, ici, des genres, des thèmes, une espèce de bissectrice inédite entre Springsteen et Costello, secondée par une très nette maturité, parfois même un peu troublante, jusqu’au design, donc, de la pochette…

 

 

675. Ten Years After, Crickelwood Green, 1970 | BV

 

C’était le bon temps, et on produisait des disques à tire-larigot. On le décrit comme le meilleur du groupe (j’ai une préférence pour Stonehenge) et on voit bien ici la recherche en acte d’un groupe de power blues à frisottis psychédéliques, qui doit non seulement se détacher des concurrents (Creedence donc, Jimi Hendrix Experience, voire les Doors) et y parvient, avec des originalités que ne dédaignerait pas un Prince (50000 Miles…). Sans ces excursions hardies (Circles) ou plus strictement rigoureuses (Love Like A Man), cela resterait un album aimable de blues américain, un disque des Doors. As The Sun… démontre cette ambivalence, arnaquée par les machines d’Andy Johns.

 

 

131. Creedence Clearwater Revival, Creedence Clearwater Revival, 1967 | BV

 

 

Il faudrait réécouter tout Creedence pour comprendre ce qu’il s’est passé avec ce groupe. Les chansons comme les textes sont on ne peut plus simples, c’est peut être la sincérité ou l’engagement de Forgerty qui fonctionne mieux qu’ailleurs… Ou alors c’est la voix, épaisse et rauque, parfaite pour l’exercice. Sans doute un peu des deux : une voix qui sait rendre subtil des basiques — comme d’ailleurs les soli de guitare, de même acabit. Cet album est meilleur, même s’il est sans doute un peu moins connu que les autres, et marque le début d’une production de hits incomparable dans la période — même si ici on a deux reprises, et lesquelles ! I put a spell on you et Susie Q. Mais tout est là : la caresse vaguement progressive sur un blues blanc et boueux, qui ne déroge pas à un certain mystère propre au bayou, notamment dans l’extraordinaire Walk on the water.

 

Eric Darsan † Rapport sur la (dé)construction du Général en parti[cul(i)]e(r)[s].

Eric Darsan

Né en 1975, Eric Darsan est écrivain, critique et nomade. Il publie textes et articles dans diverses revues littéraires en ligne (remue.net, Poezibao, Sitaudis, La vie manifeste, etc.) ainsi que sur son site personnel, avec un intérêt particulier pour l’édition indépendante, la littérature contemporaine et expérimentale, poétique et politique. Il est l’auteur du Monde des contrées, paru en 2016 aux éditions Le Tripode, une introduction à l’œuvre intégrale de Jacques Abeille illustré par les 400 coups, collectif d’une vingtaine d’artistes sérigraphes.

Membre actif du Général Instin,  il est également l’auteur de (G)rêve, Général(E) : Chant de guerre pour l’armée d’Instin, une série insurrectionnelle en quatre temps publié en collaboration et en simultanée sur Remue.Net et Lundi Matin. Le général en mouvement(s), Instin, de l’IS au NSK : tentatives d’approche du fantôme collectif, a fait l’objet d’une Conférence performée à la SBC Gallery of Contemporary Art dans le cadre de Publishing Sphere où il était invité avec Patrick Chatelier pour représenter le GI.

 

« DGSI partout, GI nulle part ! »
Statu-t/-e du Général Instin, 10/09/2019


In-/Con-struites par les plus éminent·e·s spécialistes dé-/re-pêché·e·s de/par la PP (Police Po-é-li-tique), nos informations (quantiqu-/-tativ-/ement astronomiques) en provenance du CERN (Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire, avec un O mal fermé devenu C — couac infinitésimal) et de la DGSI (DST+RG-GI) sont (in)formelles : le Général est en marche (comme on dit en voiture Simone) : c’est là son principal moyen de locomotion (la marche, pas si molle). Bien entendu, il faut avouer que ça prête à con-t/f-usion(s) cette façon de. Mal parler [ce texte a été initié à/pour l’oral — après c’est parti en q(uen)ouille] d’une personne comme s’il s’agissait d’un mouvement.

Pourtant, si on les décompose sur le mode de la chronophotographie, qu’on saisit/isole chaque instant en (con-)séquences, le Général comme son pré-tendu (c’est entendu, di-s/-t) mouvement (Général & parti[cul(i)]e(r)[s]) se (dé)multiplient, se r-e/a-ssemblent successivement jusqu’à se re-joindre et in-/con/-stituer [(dé)formation] une seule unité [division], unique pulsation sonore induisant un rythme à une période/fréquence que l’on peut mesurer ainsi (grâce aux dernières avancées de la chronobiologie anthropométrique) : G=I+G= GI.

Du moins c’est ce qu’on dit (nous l’allons montrer tout à l’heure).

(Avertissement : ce qui suit est une expérience de pensée, toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé sera déterminée par l’intervention de l’observat·rice·eur, conformément aux instructions du Général Erwin Rudolf Josef Alexander Schrödinger).

A-G

GI marche, donc, comme un seul homme [ou femme, genre on ne sait pas]. Au pas, ou pas. Mesuré, pour être précis : une deux (bis repetitae) [autrement dit : pas de deux, dit aussi : pas (maré)cha(u)ssé(e) — vue du dessus : : / de côté : ..]. Une par(t)i(culari)té qui lui donne généralement l’allure androgyne d’un métronome. D’ailleurs, quand il prend les transports en commun, il marque la mesure de même, dodeline de gauche à droite (et vice versa). Mais il arrive aussi que le Général accélère, hâte le pas de course, charge comme un sauvage, d’avant en arrière-garde/cour[re comme un dératé].

Parfois (de plus en/le plus souvent), comme un(e) vieil(le)( h)ard(e), le Général aime que les choses soient égales, qu’elles soient régulières. Que rien ne dépasse. Que tout soit uniforme. C’est reposant. Cela lui permet, à lui, d’être en mouvement. De dé-river/-lirer. Quitte à s’exclure, à sortir, à surgir, à se jeter dehors, à se ruer dans l-e(/a) ru(e), à quitter l’(h)UT(te) (Unité Territoriale) pour le (Hors-)sol.

B=

Le Général est in-/ex-clusif dans le même temps/espace/syntagme/segment. Quand il dit j’erre, il digère [, ]vraiment. Il a un appétit dément, pas d’oiseau, mais de vraies fringales. Et quand il a terminé de se fringuer, il sort et dit gère à son corps défendant. Il se préfère i(rré)sol-é(-/u)ment solitaire, plutôt que mal accompagné. Suit un régime particulier (: c’est un(e bande de) jeune(s) à lui tout seul) qu’il respecte à la lettre (lui qui commande, qui obéit : GI reste & GI suit). Avant de sortir, il se fend la gueule(,) cassé(e) d’un large sourire et de quelques plaisanteries qu’il garde pour lui (c’est là son joker). Dans le cas (toujours particulier) où il viendrait à se rencontrer au gré d’un dîner mondain et ne saurait pas quoi se dire ou faire, comment se (re-/dé-)tenir en société. Secret et volubile, GI s’efface, s’oublie et s’éparpille en — babilles.

C-I

D’Instin, on ne sait pas grand-chose dans le fond. En tant qu’homme, ou femme, il ne faut pas le chercher. En Général, on le trouve. Bienveillant envers les hommes, les femmes, les enfants et les animaux, il passe son temps en différ(-e/)ant(s) avec\contre ses semblables, sans répit ni repos. Dispos, vacant, il va, quand il en a le temps, vaquer loin du troupeau, de l(’)a(t)[ ]troupe(ment).

A ce moment précis passe un enfant, passe un oiseau. Pas un ange (on n’a pas le budget pour ça, pas les relations qu’il faut), mais un passereau. Pan ! Bang ! : le Général a sorti son flingue, flingué l’enfant : flingué, l’enfant ! Alors on ne salue plus, a demandé le Général, comme pour lui-même. Et Instin de répondre, le clope au bec, saoul comme une grive : nan.

D+

GI ren-/dé-/ren-gainant (il participe, présent), en prend de la graine après coup, égrène les raisons de la gêne. De l’oiseau il n’a que faire, qui tient trop à ses plumes pour risquer le tiers de la moitié du commencement d’une [barbe=>G/R/H-achis].

Et c’est ainsi qu’Instin songe/observe/s’aperçoit/comprend en Général et conclut : l’enfant au fond, et surtout dans sa forme (du moins ce qu’il en reste) n’est pas l’étranger. N’est pas camus, couvert de sang : il est mort pour de(ux) faux : pour l’adulte et pour l’enfant. Mais c’est déjà trop, traumatisant, trop marcher dans les pas de l’adulte vieillissant. Alors GI se jette contre les murs et y imprime – rouge sang sur faux sang blanc – son non ancien, son nom nouveau, qui le voit naître et grandir et mourir tout-en-un : Instin. Général. Général Instin.

E-G

L’enfant, c’est l’Enfance du Général. Que le Général a tué. Par lui-même (by himself – le Général, en grandissant, a appris la langue commune à son temps). C’est ainsi qu’il s’écri-t/-e. Fait entendre sa voi-e/-x par ses mains.

Et c‘est alors que l’enfant se relève. Le Général n’a pas totalement tué l’enfant. Ou plu(s )tôt : pas vraiment. Il l’a tué avec ses mains d’adulte [en] (in)complet, sous couverture, déguisement (déguisement vrai, mais déguisement tout de m-è/ê-me), mimant des pistolets. L’index et le majeur joints en barillet, l’annulaire en guise de gâchette et le pouce en chien de fusil. Son petit doigt, lui, ne dit rien. Témoin pourtant, mais silencieux tout de même.

F=

Le meurtre n’a pas fait de bruit, il s’est fait en silence. In-/Con-struit progressivement. Comme une intrigue, avec ressorts et tout. [F®iction] in-/ex-clusive, ir-/réductible de parti[cul(i)]e(r)[s]. Désormais GI est HS. Hors-Sol, réellement. Réalisé et réifié, monde et hors-monde, arche et soubassement, chtonien et ouranien, tout ou rien, léger et terrifié dans le même temps, GI erre et rit comme un damné de la terre. Reste 2 π R. Inspecte le périmètre, en connaît un rayon, tourne en rond, s’oppose diamétralement à toute tentative d’encerclement. G demeure un mystère, I[l] s’ignore et se découvre continuellement. Chez lui. De là, depuis, le Général nous somme de faire/de dire/d’être le Général : nous qui lui donnons perpé-/mu-tuellement naissance et le perpé-tuons, nous(, en) sommes, nous sommes Le Général, astre brûlant et froid en perpétuelle (r)évolution.

GI=HS

In General imus nocte et consumimur Instin