596. Black Sabbath, Sabotage, 1975 | BV

 

 

Quoi de plus ridicule (Kiss mis à part) et bête (Ramones mis à part) que Black Sabbath ?

Moi je n’écoutais pas Black Sabbath. J’en avais vent, mais je n’ai vraiment jamais écouté, avant cette passion-chronique. Jusque là rien d’original : je n’avais pas non plus vraiment écouté les Ramones, ni Siouxsie, ni les New York Dolls, par exemple. Dans ma tête, BC et AC/DC, par exemple, c’était à peu près kif kif.

Puis j’ai écouté.

Alors bien sûr ce n’est pas la musique que j’emporterai dans une ville déserte. Mais le très léger avantage de Black Sabbath sur les autres, c’est précisément celui du hasard temporel, mais qui dénote (toutefois) une certaine vivacité d’esprit : le premier album est de… 1970 ; on a de la peine à se représenter le paysage sonore de l’époque, le premier truc vraiment punk, du MC5, c’est aussi 1969. Et en face on traîne sur Let it be.

L’ambiance générale est à la décontraction, je veux dire par là qu’il n’y a pas de prétention qui excède les capacités ici réunies. On a évidemment des hymnes classiques du métal (ce qui me touche le moins), qui est toujours cet espèce de rock blanc qui hésite entre chant folklorique irlandais et symphonie gothique, bref entre rythme et blues mitteleuropesques. On a ces exemples avec Hole in the sky et Symptom of the universe.

Mais là où BS nous bluffe c’est lorsqu’il parvient à faire du Led Zeppelin (on vient justement d’en parler) mieux que Led Zeppelin lui-même, avec la voix sensiblement pompée sur celle de Plant (Megalomania, The thrill of it all), et puis, et puis…

un juste dosage de progressif qui permet de, osons le mot, de transfigurer nettement les morceaux, comme dans le floydien Supertzar, voire dans le barrettien Am I going insane (comme par hasard), pour culminer dans le très réussi The writ (un clin d’œil à One of these days ?).

On ne ressort pas déçu de cet album, surtout lorsqu’on entre avec un a priori négatif, on est même plutôt content de son expérience, comme de lire un passage du Hobbit ou regarder un extrait de Game of thrones, avec en fond la très jolie mélodie acoustique de Don’t start (too late).