300. Colette Magny, Les Tuileries, 1964 | BV

 

 

Si on ne connaît pas la voix de Magny, à part le fait qu’on est chanceux de pouvoir la découvrir, on risque d’être passablement bousculé par ce disque, à la fois chanson traditionnelle, psychédélisme avant l’heure, poésie pure, rock, et Colette Magnyesque. Magnyfique artiste, pleine d’idées, de force et de joie, d’espérance et de violence esthétique, c’est précisément tout ce qui manquait côté chanson, à cette époque pourtant bénie. Malheureusement, Colette Magny restera confidentielle, peut-être parce que trop blanche pour être noire ou trop femme pour être un bonhomme.

Je ne sais pas : on dirait l’Île aux enfants sous acide, c’est superbe. On est peut-être un peu moins désarçonnés par les reprises américaines — mais c’est que le disque est un assemblage de ses “singles” précédents. Il est peut-être un peu long. Mais les chansons, littéralement, dépècent nos âmes ou écaillent nos larmes. C’est extraordinaire (Melocoton, Les tuileries, Heure grave) et parfois tout simplement parfait : J’ai suivi beaucoup de chemins.

Je l’ai connue à travers un disque de comptines pour enfants (Mon p’tit coco, La p’tite poule rousse, ça vaut le déplacement), et tout à coup, ces chansonnettes devenaient des invocations, des imprécations hallucinées, les enfants n’auraient jamais pu dormir, ils rêvaient de donner la réplique à Loleh Belon sur des planches enflammées, ou ils mouraient terrorisés. Et puis j’ai découvert son œuvre. Un genre de parèdre de Syd Barrett, en plus femme, en plus française, en plus punk.