Benoit Vincent | Heidegger à la plage 3

 

Sur l’écueil, la mer
le bleu et trop
de livres.

Tricot de peau de laine jaunie.

Arrive un groupe de jeunes gens du coin
quatre garçons
quatre filles
les surhommes les surfemmes.

à jamais, je reviendrai, pour cette même et identique vie, dans le plus grand et aussi bien le plus petit

Ils viennent sans cesse,
adversaires redoutables,
signifier notre fin,
la fin du vieil homme
à la plage.

Ils ont un ballon et ils jouent.

Insouciants, nous écrasent,
avec leurs peaux mordorées,
leurs muscles,
leurs chairs
– chair des garçons – chair des filles –
beaux, beaux,
inexorablement beaux et jeunes
et ils nous écrasent,
nous, nos tricots jaunis,
nos slips de bain trop larges,
nos vieilles jambes blanches
et nos yeux flétris.

Usant du ciel comme chemin
de la mer d’argent comme une lame
du soleil comme un regard.

Inlassables, ils reviennent.

Nous enfoncent loin dans le sol,
sur la terrasse d’un restaurant,
où tous les tentacules,
tout le vin blanc frisé,
n’échappent pas à
l’écume.

“l’essence du péril s’abrite en retrait”

 

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