Jian • Contrespaces (de la rémanence) (7, et dernier) • fr. 31-34

Hors-Sol attaque la publication d’un texte reçu il y a quelques mois (via réseaux sociaux). L’auteur explore ici les moyens d’une révolution, qu’elle soit politique, écologique, littéraire, philosophique. Dense et ardu, ce texte expérimental est parfaitement stimulant.

A noter la participation de Frédéric Dupré qui vient « accompagner ces propositions de ses puissants dessins ». On le retrouve sur son blog Le Griffonneur.

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Nous n’avons surtout pas besoin de plus d’ « esprit » ou d’un « nouvel esprit ». Mais la révolution est en-corps spirituelle : si nous re-trouvons le sens de « souffle » : inspiration et expiration. Re-plonger dans la mouvance des spires ou la motilité brute. C’est une question de respiration, en son sens le plus terre-à-terre. Notre esprit charnel prend sa source dans la re-spiration, dans le mouvement de libération des possibles, et identifié à l’imagination en tant que souffle de l’esprit. L’inspiration de l’esprit doit tout à ce à quoi il aspire.

Ce souffle peut déboucher sur des opérations de langage : décliner chaque nom selon les flexions, inflexions et réflexions qui monstrent les innombrables fluctuations de la chose (or, tomate, taupe, homme,…) et son écueil mortifère lorsqu’elle se mure en Objet, dont la trajectivité éco-techno-symbolique est déniée.


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Nous sortons du schème sacrificiel qui préside les mobilisation infinies, qu’elles se veulent « révolutionnaires » ou « conservatrices » (et leurs conjonctions plus ou moins oxymoriques). Manière reposant sur la projection de tout ce qui devient sur un seul et même axe vertical : sèche antithèse disjoignant un ciel valorisé et une terre abjectée.


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A l’ère du biopouvoir et de la privatisation des existences, il ne s’agit plus tant de ré-sister, que de con-sister. Respirer au politique présent. Conspirer de puissance.


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La raréfaction de tensions ré-volutionnaires, de re-tour vers l’avant du cycle initiatique est un désastre, non pas moral ou politique, mais hétérologique. Le cycle n’est pas le contraire de l’invention (invenire : venir vers, venir à, venir dans : advenir au monde en l’inventant). Le temps du venir n’est pas l’opposé du temps cyclique, sauf là où les êtres sont expulsés de leur situation vivante, chassés de leur terre, privés de leur ciel et rendus étrangers à leur humus, à l’humble et fulgurante puissance du vivre. Nous pouvons le chantier.


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Etirer sa fin par-delà l’histoire, se retirer dans cet espace désormais ouvert de la fin qui commence, puisque le post- semble à nouveau un pré-, l’après une sorte d’avent

(aventus : « l’arrivée, la venue », en tant qu’elle est « désirée, espérée, attendue »)

Ou alors, rien ne résiste à la destruction.

Et de cela, c’est le silence qui parle.

A nous de le porter, de le montrer, de le chanter : matérialiser les rémanences dans les contrespaces
Imminence. Incantation qui fait lever un monde. Et chaque aujourd’oui du jadis lance l’offrande et l’occasion d’espacer le temps : de décider en quoi ce n’est plus le temps, mais notre temps.

Nous regardons vers le large, vers le Pontos (d’où vient aussi le mot « pont ») enfant de Gaïa, « avant » Chronos. Les problèmes (re)commencent à se poser, existentiellement, ici sur la Terre, cette merveille.

Ralentis camarade, le vieux monde est en toi.


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« Tu devras construire le passage, c’est dans la ruine du reflet que tu le découvriras, dans la ruine des eaux déjà impropres à porter l’idée des navires.(…) C’est dans la ruine du reflet que tu dissimuleras la dernière balise. C’est dans la dernière balise que tu feras mine de flotter, car il faudra continuer à feindre. » A.Volodine


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