Liste des participants à l’ “Enbiblioquête Hors-Sol”

Hors-Sol a proposé une enquête à plus de trente lecteurs assidus leur demandant de dresser une liste de quelques livres, deux trois par an, pas davantage, qui, selon eux, étaient appelés à demeurer. La période considérée étant la décennie 2001-2010.

Le texte de l’enquêteLes contributeursLes auteurs citésLes éditeurs cités

Les résultats : 2001200220032004200520062007200820092010



Stéphane BikialoGuénaël BoutouilletCharlotte DesmousseauxCaroline GérardQuentin LeclercChristophe ManonRaymond PenblancMartin RassHugues RobertCharles RobinsonJoachim SénéFrançoise TresvauxBenoît VincentNicolas Vivès

 
 
  
 
 
 
 
 
 
 
 

Stéphane Bikialo, enseignant et chercheur en langue et littérature françaises contemporaines.
La Licorne : http://licorne.edel.univ-poitiers.fr/ ; Master Livres et médiations : http://ll.univ-poitiers.fr/masterlivre/

Je me suis prêté au jeu avec un certain plaisir, d’essayer de retrouver de mémoire, puis de me promener dans ma bibliothèque, puis d’en discuter avec des amis… Sur la question même, j’ai fait selon mes goûts plus que selon le goût supposé des autres ou de la postérité.
Je me suis juste interrogé sur la place à accorder à la BD, aux albums jeunesse, à la poésie, au théâtre, que j’ai finalement intégrés dans “fiction” mais avec un peu de réserve.

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Guénaël Boutouillet, auteur, formateur, médiateur web & criture : s’est expliqué sur sa contribution sur son propre site, Matériau composite :

http://materiaucomposite.wordpress.com/2013/05/14/trente-neuf-sur-quatre-vingt-dix-neuf-presque-tout/

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Charlotte Desmousseaux est libraire à Nantes depuis 2007. Apprentissage, enthousiasme, transmission et curiosité.
Les Enfants Terribles : http://lesenfantsterribles.hautetfort.com/

Bon voilà. Pourra-t-on la compléter de temps en temps? [Ndlr : oui, bien sûr]

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Caroline Gérard est éditrice chez Cousu Main.
Cousu Main : https://cousumain.wordpress.com/

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Quentin Leclerc était étudiant mais a arrêté parce qu’on ne peut pas tout faire en même temps. Relevés : ql.relire.net

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Christophe Manon est poète.

Je m’aperçois en y jetant un oeil à nouveau que je n’avais rien pour 2001 et 2002. Il faudrait que je recommence à farfouiller un peu pour compléter. J’espère avoir un peu de temps pour m’y remettre avant la fin du mois.

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Raymond Penblanc est auteur ; il a publié trois romans aux Presses de la Renaissance, des nouvelles dans une vingtaine de revues dont La Revue des Ressources, remue.net, Brèves, La Femelle du Requin, Secousse, Levures Littéraires, Harfang, ainsi qu’aux Editions de l’Abat-Jour. Il est actuellement au sommaire de Nerval.fr, et de Short-Stories-Etc # 11. Deux récits sont à paraître prochainement aux éditions Lunatique….

Votre enquête a suscité en moi trois questions.

1. En effet, me suis-je dit, parmi les centaines de romans (car dans cette enquête je n’ai retenu que des romans) lus entre 2001 et 2010, le moment ne serait-il pas venu de dresser un bilan ?

2. Bilan toujours aussi excitant que frustrant. Pour certaines années, on retient cinq ou six titres, pour d’autres seulement un ou deux. Malgré tout on y arrive. Evidemment, ces trente titres (et ces trente auteurs, puisqu’il n’est pas permis de les citer deux fois, dont un certain nombre seraient sans doute surpris de se retrouver en pareil voisinage) sont censés proposer un miroir relativement fidèle de nos goûts — de nous-mêmes. Et c’est ici que survient la deuxième question, double. Quel fil conducteur entre ces trente titres, quels liens ? Leur dénominateur commun, je le connais, puisque c’est moi. Suis-je cependant assuré de me retrouver dans ce miroir?

3. Sachant que je ne suis pas seul, il me vient une troisième question, double elle aussi. D’autres lecteurs partageront-ils certains de mes choix (et moi les leurs ?) N’est-ce d’ailleurs pas à une confrérie de lecteurs que j’aimerais surtout appartenir (plus qu’à une improbable galaxie d’auteurs ?)

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Martin Rass est chercheur ; ni auteur, ni critique, ni libraire, ni éditeur.

Voici ma liste, certaines années sont pauvres, pour d’autres il y en a trop, si je pouvais mettre des auteurs étrangers pour la parution dans leur pays, la liste serait différente, et comme je l’avais dit dès le départ, une grande partie de ces livres, je ne les ai pas lus lors de leur sortie en France (avant pour les étrangers, après pour pas mal d’auteurs français)

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Hugues Robert libraire passionné et pointilleux à la librairie Charybde à Paris.

Mais je redis que c’est un exercice super difficile !

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Charles Robinson est romancier et auteur de créations sonores. Site personnel : http://charles-robinson.blogspot.com

C’est noté, je vais me pencher sur l’enquête, elle me semble utile. Il faut réaffirmer que l’époque ne manque pas d’œuvres […] le plus dur est d’enlever des titres…

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Joachim Séné. Site : joachimsene.fr

Qu’un livre “reste”, qu’est-ce que cela veut dire ?

Cela veut dire qu’un texte ne doit pas uniquement me plaire, même pas nécessairement me plaire, il doit aussi durer au-delà de moi, au-delà de l’auteur, au-delà de la civilisation peut-être même : il doit rester. Mais rester où ? Dans le top-vente ? En classe de première pour le bac de français ? À l’université ? Dans le domaine que certaines émissions littéraires appellent parfois “la vraie littérature” ? Un mauvais livre étudié en classe va-t-il rester parce que chaque année des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers de lycéens l’achètent ? Est-ce cela, rester ?

À l’université, il me semble, moi qui n’y ait pas fait d’étude, que les livres étudiés soient des jalons de la création passée qui permettent de comprendre la production actuelle et ses différentes formes littéraires.

Ce qui reste serait donc ce qui permet de comprendre ce qui se crée.

Ce qui restera serait donc ce qui permettra, demain de créer.

J’ai tendance à penser qu’un livre se transmet à travers les années parce qu’il dit quelque chose de son époque, qui a été entendu tout de suite (il faut bien un départ, même minimum) mais est surtout entendu plus tard, et de plus en plus, avec le recul, les années, parce que le temps a fait que chacun peut être sûr que ce livre ne se trompait pas, ne se trompe pas : la vérité doit bien traîner toujours quelque part pour qu’on s’intéresse.

Et ce que ce livre dit est suffisamment vrai pour être entendu comme si c’était écrit maintenant. Il est resté. Durera-t-il encore ?

Il faudrait trouver des livres qui, des années, des décennies après, peuvent être lus de manière à voir, aujourd’hui, clairement qu’ils s’étaient trompés alors, et comprendre comment ceux-là “ne peuvent donc pas rester”, bien qu’en les lisant, on se pourrait se dire qu’ils sont quand même restés…

Alors peut-être que tous les livres restent, mais pas pour tout le monde.

Ces livres, ils doivent rester pour qui ? Et pour quelles raisons ? Est-ce que cela se joue au niveau des sources d’inspiration de ceux qui produisent ? Si un livre n’inspire plus, est-il encore lu ? S’il n’est plus lu, confidentiel, introuvable, inspire-t-il encore ?

Cette question de ce qui reste, ce qui est classique, ce qui est de la “vraie littérature”, soulève toujours des débats très animés, comme le sont les débats politiques…

Car il s’agit au fond d’une question de distinction. Ce qui reste pour un ouvrier ne sera pas ce qui reste pour un artisan, un petit commerçant, un patron, un cadre sup, un prof…

Distinction au sens où Bourdieu explique que la classe forme le goût qui identifie la classe (je n’en suis qu’au début de La distinction, c’est ma lecture lente d’une écriture très précise, de concepts qui bousculent).

Qu’un livre “reste”, il faut aussitôt se demander “pour qui ?” Et là on entre dans un goût qui va me distinguer des autres goûts qui ne sont pas miens.

Autre facteur, pour les livres qui sont, comme dirait Irène Lindon “un objet industriel”, la disponibilité est un facteur important pour “rester”.

Disponibilité, distinction, je vais essayer de lier les deux phénomènes par l’exemple suivant.

En 2004, il était impossible de dire que Le grand homme, de Philippe Soupault, était resté puisqu’il était indisponible depuis environ 1983, après que les éditions Lachenal et Ritter avait été rachetées par Gallimard (en 1979), sélectionnant dans le catalogue, distinguant certaines œuvres et pas d’autres, pour des raisons annoncées de rentabilité.

Le roman de Soupault, qui ne ménage pas la grande bourgeoisie, n’a pas été ainsi distingué par le groupe. Son propos, tellement marqué par l’époque, la quitte quand on croit celle-ci révolue. Écrit en 1929, comme une prémonition mal reçue à l’époque, republié en 1945 avec un dévastateur avertissement de l’auteur (en postface dans l’édition de 1981) qui pouvait alors dire “j’avais raison”, au regard des 99% de la bourgeoisie collaborationniste (dont Louis Renault, visé sans être nommé dans le livre, et qui dut accepter la nationalisation de son entreprise comme compensation, comme pour payer son attitude) son regard était, selon moi en 2004 quand je cherchais le livre, resté valide depuis : la même engeance état au commande de l’économie, mais elle était comme en repos, ou plus discrète ; en tout cas l’avait été et l’était un peu moins depuis quelques années que j’avais du mal à préciser.

Comment ne pas voir, avec la frénésie des emprunts et de la finance, avec la spéculation sur les matières premières, les subprimes, la dette grecque, le cynisme des mêmes décrits par Soupault ? Ce qu’il dit dans sa postface, avec le recul, est donc tout à fait recevable pour l’époque.

Ce livre, pour moi, je ne le comprends qu’aujourd’hui, “restait” donc, bien qu’introuvable autrement que dans le fond inaccessible de Gallimard, autrement que par un très léger harcèlement boulevard Raspail.

Et comme pour confirmer ce que j’avance sur l’époque, et du point de vue économique sur la mise à disponibilité d’un ouvrage, qui est fond dire que l’époque va faire vendre ce livre car elle en parle sans le savoir et lui aussi… ce roman a été republié, dans la collection L’Imaginaire en 2009 : http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/L-Imaginaire/Le-grand-homme
La couverture de l’édition de 1981 : http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Lachenal-et-Ritter/Le-grand-homme

C’est à dire que le livre disparaît car il ne correspond plus, ou l’éditeur ne veut plus qu’il corresponde à l’époque, ou il ne croit pas qu’il corresponde à l’époque, et les lecteurs également car l’on suppose qu’en bon gestionnaire l’éditeur se dit que le livre ne se vendra pas après, dans notre exemple, une victoire des socialistes, pensant peut-être à l’alternative “socialisme ou barbarie”. C’est un livre daté qui n’intéressa plus personne, peut-être un ou deux chercheurs en Histoire iront l’emprunter à la BNF mais sans plus.

Or, le repos relatif de la classe des 1%, pour prendre une dénomination récente, leur discrétion évaporée, ils se “vautrent dans la boue” (pour reprendre Soupault) et éclaboussent tout le monde, quelque chose se brise lentement, les masques tombent, depuis des années, et en 2009 il est plus que temps de sortir le livre à nouveau…

Voilà comment je comprends la disparition et la réapparition de ce livre de Philippe Soupault.

Et voilà comment je ne peux pas répondre à la question, car si un livre ne reste que parce que son époque et son contexte se maintiennent… c’est à la fois imprévisible et désespérant.

Si un livre reste parce qu’il représente si bien son époque, ou un fragment de son époque, une sensation de celle-ci, qu’il en est un témoignage rare, lumineux, intelligent, alors je pense à deux livres, dont le temps ne pourra pas ôter la précision et la justesse des monologues et des sentiments qui les composent :

Laurent Mauvignier, Ce que j’appelle oubli (2011) et Dans la foule (2006), chez Minuit.

qui sont selon moi deux saisies extrêmement palpable de ce qu’est notre époque (mais que veut dire “notre époque” ?) et dont la langue porte quelque chose de suffisamment neuf et d’original pour être, peut-être, le signe qu’il n’était pas possible de dire mieux ces faits divers à ce moment-là, et que ces faits représentent le mieux, d’une certaine manière parmi d’autre certes, mais d’une manière indispensable, ce temps où ils sont dits.

Un autre jour, il faudrait peut-être plus longuement que je parle de ces deux textes.

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Françoise Tresvaux a créé en 2006 les cafés littéraires de Bollène (Vaucluse), déplacés aujourd’hui à Sainte-Cécile-les-Vignes. Site : http://calibo.free.fr

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Benoît Vincent est auteur et coanimateur de la revue Hors-Sol ; n’avait pas le droit de jouer, a joué quand même. Ambo(i)lati : http://www.amboilati.org

Je me suis rendu compte que j’ai commencé à lire de la littérature contemporaine très tard, grâce à un livre de Frédéric Mora, La nuit des nuits (Seuil 2003), et à l’écoute assidue des émissions nocturnes d’Alain Veinstein à cette même époque… Une lecture a posteriori (un “rattrapage”) a permis de récupérer une infime partie du retard.

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Nicolas Vivès est libraire chez Ombres Blanches à Toulouse. Ombres Blanches : http://blog.ombres-blanches.fr/

[V]ous m’avez posé de gros problèmes, dans mon métier on a plutôt tendance à être tourné vers ce qui n’est pas encore paru, sur ce qui est en mouvement perpétuel, sur les tendances à venir, sur la création en temps réel … bref on a rarement l’occasion de regarder dans le rétroviseur pour voir ce qui reste et surtout comment cela reste-il ! Votre enquête est l’occasion de faire cela. J’ai donc choisi des livres, principalement des romans, qui me paraissent immanquables ces dernières années, des textes qui m’ont interpellés, en toute subjectivité, parce qu’ils sont dans mon parcours de lecteur des pierres fondatrices.

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